Sacré lotus
L’histoire n’a pas fait beaucoup de bruit dans la presse thaïlandaise, mais elle est tombée à pic. Quand l’actualité est calme, nous cherchons de belles histoires visuelles. Nos clients en sont très friands.
"Nelumbo nucifera", ou plus simplement « bualang » en thaï, est la fleur fétiche du bouddhisme. Les Thaïlandais la déposent en offrande devant les statues de Bouddha.
Elle est endémique dans la région, mais a souffert de la pollution et de la sécheresse, c’est pourquoi elle avait quasiment disparue du parc de Khao Sam Roi Yot.
Curieusement, l’autorisation de couvrir cette renaissance a été assez difficile à obtenir auprès des autorités.
D’abord, nous avons dû les convaincre que nous n’étions pas une équipe de tournage étrangère préparant un film documentaire. Ce qui nous aurait obligés à embaucher un chaperon et obtenir un permis.
La relation des journalistes avec les autorités est un peu compliquée, mais finalement elles nous ont accordé l’autorisation de faire ce reportage. Tout en nous prévenant qu’elles ne pouvaient nous garantir que les responsables du parc national soient aussi coopératifs.
Nous sommes arrivés tôt pour profiter de la lumière matinale, avant que celle de la journée n’écrase le relief et les couleurs. Vers six heures du matin des villageois nous ont emmenés sur le lac dans leurs barques en bois.
En revenant sur la berge, nous étions attendus par des gardes venus vérifier ce que nous faisions là. Le directeur nous a expliqué que le parc n’était pas dans un état idéal. Les gardes plantent des graines le long des pontons pour favoriser le retour de la plante, mais ces efforts n’ont pas encore porté tous leurs fruits.
Le directeur nous a dit aussi craindre que des reportages comme le nôtre provoquent un afflux de touristes et de visiteurs, qui nuirait aux efforts de réhabilitation de l’endroit.
Mais les choses sont un peu plus compliquées. Le lac a souffert de rejets de pollution de localités voisines. C’est un sujet sensible, sur lequel les personnes en charge de du lac et de sa restauration ne souhaitent pas s’étendre.
La situation est un peu paradoxale. Les responsables du tourisme à Bangkok font la promotion de l’endroit, mais ceux du parc national sont préoccupés par sa conservation.
Le tout illustre bien la situation de nombreux sujets dans le pays. On trouve une bonne histoire, avec de belles images, mais en se rendant sur place on se rend vite compte que les choses y sont un peu différentes. La seule façon de s’en assurer est d’aller vérifier sur place.
L’endroit est joli, pas impressionnant, mais joli, avec ce paysage ceinturé de montagnes. Il a fallu que nous travaillions rapidement parce que le ciel était menaçant. Le vent s’est levé, et le drone a pu rester en l’air à peine deux minutes. Nous avons eu à peine une demi-heure avant qu’un grain ne nous tombe dessus.
Ce billet de blog a été écrit avec Pierre Célérier à Paris.