Décrocher la Nouvelle lune
Xian, province de Shaanxi (Chine) -- Le Nouvel an lunaire est un événement très important en Chine. Une semaine avant la date et les vacances qui l’accompagnent, se déroule la plus grande migration humaine sur terre. Des centaines de millions de Chinois rentrent dans leurs villes ou villages d’origine pour passer les fêtes en famille.
C’est là que l’on peut mesurer, dans ce pays de 1,3 milliard d’âmes, l’importance que revêt la famille dans la société chinoise. Sa place y est beaucoup plus grande, je crois, que celle qu’elle occupe dans les pays occidentaux.
On compare souvent le Nouvel an lunaire des Chinois à notre Noël. Mais cette dernière fête n’occupe qu’une journée et une soirée. Alors que le Nouvel an est une célébration d’une tout autre ampleur, sur une semaine, avec un tourbillon de repas, de réunions familiales, de feux d’artifice et de foires.
Les prémices de la fête apparaissent environ un mois avant, quand les lanternes à la forme si typique font leur apparition dans les rues, les centres commerciaux et derrière les vitres des habitations.
Ensuite ce sont les gares, d’ordinaire plutôt bondées, qui s’animent encore un peu plus. L’atmosphère générale s’en ressent. Et dans la dernière semaine avant la grande transhumance ça devient dingue.
C’est la première année où j’ai eu la chance de couvrir l’évènement en dehors de la capitale. J’ai pris un train pour Chengdu, capitale de la province du Sichuan, dans le centre-ouest. Il était si plein de monde que dans mon wagon des dizaines de personnes ont dû faire le trajet debout. Ça dure 26 heures. Le plus étonnant, c’est que l’atmosphère reste détendue et amicale. Pour moi qui vient d’un pays où l’on râle pour un oui ou pour un non, le contraste est assez saisissant.
Les gens étaient très polis. Pour atteindre les toilettes, il fallait traverser une véritable haie de voyageurs, qui vous laissaient passer en soupirant à peine. Ce serait impensable où que ce soit en Europe.
Le point fort des célébrations a lieu à la veille du Nouvel an. On a l’impression que la Chine entière s’est mise à allumer des pétards et des feux d’artifice. Ca commence vers 6 ou 7 heures du soir, et ça dure jusqu’au petit matin, avec tous les habitants dans la rue, adultes, enfants et personnes âgées. C’est un moment très spécial, où tout le monde a l’air de partager la même joie.
Pour un photographe, c’est une mission rêvée, et pas seulement parce que les feux d’artifice sont très visuels, mais aussi parce qu’à la différence de l’Occident, où leur utilisation est très encadrée, il y en a ici une grande quantité. Un photographe n’a que l’embarras du choix.
Cela étant, il se trouve que cette année est un peu différente des précédentes, parce que les autorités ont interdit d’en tenir dans les grandes villes, pour des raisons… de sécurité.
En attendant ce grand moment, on passe son temps à manger, aller à la foire, manger, rendre visite à la famille, manger, faire un tour de manège, manger, assister à un spectacle traditionnel, manger, passer chez l’astrologue, et puis manger encore.
Cette année sera celle du chien. La tradition veut que ceux qui portent le même signe que celui du Nouvel an se méfient de ce qu'il leur réserve. Une fois la fête passée, tout le monde retourne à son existence de labeur et le compte à rebours peut reprendre pour une année.
Ce blog a été écrit avec Yana Dlugy à Paris.