Bombay, la ville qui ne dort jamais ?
BOMBAY, 8 septembre 2015 – Bombay, masse humaine intense et grouillante sur le rivage de la mer d’Arabie, attire les Indiens de tout le pays en quête de travail et d’une vie meilleure. Je m’y suis installé en 2005 avec mon épouse et mon fils alors âgé de deux ans, quand j’ai été nommé photographe au bureau local de l’Agence France-Presse.
La capitale économique et plus grosse ville d’Inde, foyer des starlettes de Bollywood, a de nombreux surnoms censés résumer son côté trépidant en enivrant. «Maximum City», «La Ville des rêves», «La Terre d’opportunités», pour n’en citer que quelques-uns. «L’argent vole dans les airs à Bombay, il suffit de l’attraper» est un refrain habituel dans les films indiens.
Un autre sobriquet populaire est « La ville qui ne dort jamais ». Et c’est le sujet d’un essai photographique que j’ai commencé à publier sur Facebook et Instagram il y a quelques semaines.
A toute heure du jour et de la nuit, Bombay est réveillée. Des gens travaillent dur en rêvant de faire fortune, même si la plupart du temps ils échouent dans des boulots ingrats qui leur rapportent à peine à gagner assez d’argent pour nourrir leur famille restée au village. Depuis le chaiwallah du Rajasthan versant le thé dans la tasse de son premier client du matin jusqu’au chauffeur de taxi venu de l’Uttar Pradesh effectuant une course tard la nuit vers l’aéroport, la ville est un perpétuel tourbillon d’activité.
Mais je suis toujours étonné de la capacité des gens ici à tomber endormis au milieu de cette course folle et du vacarme incessant des klaxons, dans les endroits les plus improbables et les positions les plus étranges.
Vingt millions d’êtres humains s’entassent dans cette folle métropole. Ils travaillent souvent à des heures impossibles, doivent effectuer de longs et pénibles trajets depuis et vers leurs domiciles, et se débrouillent pour piquer de petits sommes réparateurs dès qu’ils le peuvent.
Le vendeur de noix de coco sur le trottoir, le marchand dans son magasin, l’étudiant dans le train après une épuisante journée à la fac : ils sont tous fascinants, à sombrer subitement dans le sommeil pendant que la vie continue autour d’eux. L’espace fait cruellement défaut à Bombay, mais ils arrivent toujours à dénicher un petit coin où pioncer en paix, sans s’apercevoir que je suis en train de les prendre furtivement en photo.
Bombay – qui depuis 1995 s’appelle officiellement Mumbai – est un vrai paradis pour un photographe. Il y a des histoires à raconter à tous les coins de rue. Chaque personne que vous rencontrez a un vécu passionnant à partager.
Cette ville et ses habitants ont conquis mon cœur. Bombay est devenu «aamchimumbai», ma Bombay. L’enfant de Calcutta que je suis est devenu un Mumbaikar. Même si je ne suis pas né ici, j’y suis désormais chez moi. Et mon fils, qui a maintenant douze ans, est encore plus Mumbaikar que moi.
Indranil Mukherjee est un photographe de l’AFP basé à Bombay. Suivez-le sur Twitter et sur Instagram. Cet article a été édité par Peter Hutchison à Bombay et traduit par Roland de Courson à Paris (lisez la version originale en anglais).