Ukraine, quand tout a basculé
Kiev - Dans la nuit du 24 février 2022, Daniel Leal, photographe basé à Londres, s’endort tout habillé, à l’hôtel Ukraine de Kiev, sans même retirer ses lentilles de contact. Son sac avec ses boitiers et objectifs bien prêt. Un de ses collègues journalistes lui avait soufflé quelques heures plus tôt que c’était pour “cette nuit”.
“Comment dort-on quand on attend la guerre ? (...) j'enchaîne les cigarettes sur le balcon. Je regarde le ciel, guette un mouvement ou plutôt l'absence de mouvement. Je coince le téléphone sous mon oreiller et met un podcast, les frères Karamazov. L'appareil vibre à chaque notification et je lis dans le noir…”, écrit dans son journal personnel, Daphné Rousseau, journaliste arrivée en renfort de Paris le 20 février.
Dmytro Gorshkov, rédacteur ukrainien qui travaille pour l’AFP à Kiev depuis 2013, lui, n’y croit pas. “Tout le monde pensait qu'on éviterait” la guerre. Il passe une soirée normale avec son épouse et son fils, chez lui, dans un quartier résidentiel du nord de la capitale...
A l'inverse, à quelque 900 kilomètres de chez Dmytro Gorshkov, à Moscou, Antoine Lambroschini, chef de la rédaction du bureau, a “la boule au ventre”.
“J’étais convaincu que l'offensive russe pouvait intervenir à chaque instant, tout en espérant me tromper. Mon frère et sa famille, qui vivaient depuis près de six ans en Ukraine, venaient de quitter Kiev face à l'imminence d'un assaut. Ce soir-là, avec mon épouse Sofiya et des amis on se retrouve dans l'un de ces restos branchés de Moscou, un dîner où l'Ukraine est sur toutes les lèvres : “Et tu crois vraiment? Mais non, c'est pas possible, pas en 2022!”.
“En fin de soirée, coup de fil de la veille de nuit mise en place par l'AFP pour l'occasion : les séparatistes pro-russes du Donbass ukrainien ont appelé Poutine et son armée à la rescousse.
Commence alors une longue nuit, nous nous dépêchons de rentrer ma femme et moi, puis avec ma collègue Ola Cicowlas, chacun chez soi, nous écrivons les papiers qui s'imposent. Puis, un discours du président ukrainien Volodymyr Zelensky apparaît sur nos écrans”, poursuit Antoine Lambroschini.
“La mine grave, la voix ferme, avec des paroles émouvantes adressées pour la première fois en russe au peuple russe, il lui demande de faire pression sur Vladimir Poutine pour empêcher le drame qui se profile.
L'heure est grave, et lorsque l'on se parle entre collègues, nos voix tremblent un peu, d'appréhension, de fatigue et d'émotion”.
“A 3H30 du matin - 01h30 à Paris - les dernières dépêches sont sur le fil. On peut se coucher. Le sommeil est léger, quand à peine une heure et demi plus tard, Tom Lowe mon collègue à Hong Kong, me réveille. Chargé de la veille éditoriale pendant que les journalistes du bureau de Moscou dorment, il voit passer sur Twitter des messages inquiétants.
Quelque chose est en train de se passer à la frontière russo-ukrainienne, des sites spécialisés d'aviation font état d'avions de ligne faisant demi-tour en approchant l'Ukraine, d'une zone d'exclusion aérienne, des rumeurs d'explosions apparaissent.
Je réveille notre responsable en Ukraine, Ania Tsoukanova. 'Il se passe quelque chose', lui dis-je, 'je vais voir' répond-elle. Vers 05H40 du matin à Moscou, Vladimir Poutine est soudain à l'écran de la télévision. Je sais à quoi m'attendre, mon cœur bat à tout rompre.
Martial, assis à son bureau, il répète la litanie de reproches qu'il fait à l'Ukraine, à l'Occident, à l'Otan, dénonce un génocide de russophones par les soi-disant ‘nazis’ ukrainiens. Son regard fulmine, sa colère se sent. Glaçant. J'attends l'annonce, un peu incrédule face à l'énormité de l'évènement auquel j'assiste seul, en pyjama, dans la nuit moscovite, pendant que ma femme, mes enfants dorment à quelques mètres de moi.
A part deux collègues de la vidéo et de la photo, je n'appelle personne du bureau de Moscou de peur de rater la phrase, l'alerte clé qui annoncera à nos clients et au monde l'intervention russe chez son voisin, le premier conflit du genre en Europe depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.
'05H50 de Moscou, la voilà: Poutine annonce une ‘opération militaire’ en Ukraine'.
L’alerte d’Antoine, validée par le hub de Hong Kong, qui veille normalement quand l’Europe dort, arrive dans les rédactions. Des explosions sont entendues dans différentes villes. La guerre a bel et bien commencé.
Rapidement, le siège parisien de l’AFP est en effervescence. L’organisation d’une base arrière sûre a commencé depuis plusieurs jours. Un appartement est prêt dans une des villes les plus éloignées du front, Lviv, à l’ouest.
Karim Menasria, logisticien spécialiste des grands événements, vient tout juste de rentrer après 44 jours dans la bulle sanitaire des JO de Pékin. Il se prépare à repartir pour l’Ukraine avec un stock de gilets pare-balles, casques, groupes électrogènes et du matériel informatique.
Tout sera chargé dans une voiture, achetée en Pologne, qu'il prend à Varsovie trois jours plus tard, avec à son bord aussi le reporter Emmanuel Duparcq et Colin Bertier, journaliste à l’AFPTV. La voiture déborde, d’autant qu’ils emportent avec eux une vingtaine de jerricanes pour les remplir d’essence au cas où le carburant viendrait à manquer.
La priorité est d’envoyer des équipes sur le terrain, mais dans de bonnes conditions de sécurité. Les envoyés spéciaux déployés depuis début février sont rejoints par une nouvelle salve de renforts: vidéo journalistes, reporters chevronnés, photographes expérimentés. Plus de 20 personnes au total. Ils arrivent de Paris, Istanbul, Bucarest, Athènes, Moscou, Bucarest, Nicosie…
Le 24 à l’aube l’atmosphère à Kiev est celle d’une ville qui passe de la paix à la guerre. Sorti de l’hôtel à 5h30 du matin, gilet pare-balle et casque sur la tête, le photographe Daniel Leal observe les milliers d’habitants qui déambulent, semblant s’interroger sur la suite de leur vie. Des couples se regardent intensément, d’autres, peut-être encore sidérés, vont simplement travailler.
Au fil des heures, les habitants commencent à affluer vers les gares, avec enfants, chiens et chats de compagnie dans les bras.
Ce matin-là, se souvient Daniel Leal, “les regards ont changé”. “Des familles en désespoir, des enfants en pleurs. Ils étaient en état de choc. Je m’identifiais avec les parents, et les enfants, parce que je suis père et que j’ai un enfant de sept ans, un autre de cinq et un troisième en route. Cela nous a tous pris par surprise, même moi. Je ne pouvais éviter de m’imaginer dans leur situation”.
Une atmosphère qui tranche avec son impression de la veille, quand il est arrivé à Kiev. “une ville très majestueuse, à l'architecture de type soviétique (...) une ville magnifique, j’aimerais vraiment y aller avec ma famille un jour, avec des gens très gentils”.
Pendant ce temps, ses collègues ukrainiens sont dans la tempête. “C’est leurs vies, leurs enfants, les réalisations de toute une vie”, qui sont en jeu, pense Daphné Rousseau. Le bureau de l’AFP à Kiev compte en temps normal six personnes, journalistes, photographes et personnel administratif. Chacun doit prendre ses décisions, rester ou partir.
Les hommes ukrainiens âgés de 18 à 60 ans ne peuvent en principe pas quitter l’Ukraine, sous peine d’être considérés comme des déserteurs. Le journaliste Dmytro Gorshkov, comme les deux photographes du bureau Sergeï Supinsky et Genya Savilov décident de ne pas quitter la capitale. Le journaliste convainc en revanche son épouse de partir vers l’ouest du pays avec leur fils de 14 ans. Il tient à sa ville, veut continuer à exercer son métier et doit veiller sur sa mère et sa grand-mère, de 89 ans, qui restent à Kiev.
Il avait été rejoint avant la guerre par d'autres reporters dont Dave Clark, basé à Bruxelles, qui a couvert de nombreux conflits et assure la coordination des opérations. Dmitry Zaks, anglophone et russophone arrivé d’Istanbul, est aussi là depuis plusieurs semaines. Pendant que le bureau se réorganise et que leurs collègues ukrainiens s'occupent de mettre leurs familles à l'abri, il veille au grain avec Dave.
Comment raconter une guerre sur tant de fronts ? Plusieurs flancs d’un pays attaqués. Une grande puissance impliquée. Des marchés financiers affolés. Une menace nucléaire. A en oublier l’anniversaire des deux ans de pandémie, le 11 mars qui passe inaperçu.
“Beaucoup redoutent que la crise en Ukraine ne mène au plus grave conflit en Europe depuis 1945. Une intervention russe (...) pourrait entraîner le déplacement de jusqu’à cinq millions de personnes”, lit-on dans la grande synthèse de cette journée du 24 février, qui reprend les déclarations de l'ambassadrice américaine à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield.
Les envoyés spéciaux s’organisent. On se répartit le territoire à couvrir. On prépare la logistique et on évalue où aller.
A Kiev, des rumeurs d’infiltration de Russes hantent la ville. Se déplacer dans la capitale est compliqué. L’armée traque les infiltrés. Des habitants sont invités à répéter à voix haute un mot pour montrer qu’ils n’ont pas un accent russe, montrer patte blanche. Ce mot, c’est “palyanytsa”. Une voyelle trop appuyée et c'est fini. En russe, c'est une “fraise”, en ukrainien, c'est le pain traditionnel connu de tous.
Des équipes partent sur le front, ou les fronts. A Kharkiv, la deuxième ville du pays, Olena Ostaptchenko, une habitante, raconte au photographe Sergey Bobok qu’elle a l’impression de vivre dans un film “sur la seconde guerre mondiale”.
Sa ville sous les bombes, qui compte en temps normal 1,4 million d'habitants, est à 40 kilomètres de la frontière russe, en première ligne. Avec son fils et la compagne de ce dernier, elle vit “dans le couloir et la salle de bains”, qu’elle juge plus sûrs.
D'autres se rendent à Irpin, à seulement huit kilomètres de Kiev, un des derniers verrous pour atteindre la capitale, pilonné par l’armée russe. Les photographies de bicoques en flammes dans un quartier de jardins ouvriers et le visage de désespoir de leurs habitants rapportées par le photographe Aris Messinis resteront dans les mémoires.
Chaque jour, les habitants traversent par centaines une rivière en jouant les équilibristes sur des planches en bois pour fuir les bombardements. Comme Oleksei Ivanovitch, 86 ans, qui ne voulait pas quitter sa maison, même quand les chars russes, venus du nord, ont bombardé et pris la ville voisine de Boutcha. “Ce sont mon fils et mon petit-fils qui m'ont dit de partir”, dit-il au bras de sa femme Oleksandra, 81 ans, au journaliste Emmanuel Duparcq.
Daphné Rousseau fait équipe avec le traducteur Oleksei Obolenski, le chauffeur Pavlo Popovychenko, le JRI Dylan Collins et le photographe Dimitar Dilkoff pour se rendre plus à l’Est, à Tchernihiv, à 130 km de Kiev. Ils croisent des milliers de véhicules. “Ils ont tous placardé un panneau où l’on peut lire enfants sur la vitre”.
L'équipe arrive quelques minutes seulement après des frappes. “Tout brûle encore vraiment. Des bâtiments qui, soit, sont déjà complètement noircis, soit sont écrasés, soit sont encore en train de brûler”.
“C'est le moment où on comprend qu'il ne s’agit pas d’avancer et de livrer une bataille avec l’armée ukrainienne. Il s'agit d'écraser une ville. De la vider, de la terroriser et d'en faire partir les civils à tout prix. On se rend immédiatement sur le lieu de la frappe de la veille, qui a fait 47 morts. (...) C'est un champ de ruines… Et il y a un vent glacial qui balaie en plus cette scène d'apocalypse”, raconte Daphné Rousseau.
Puis “les frappes reprennent, des frappes d'artillerie au début (....) Et rapidement, on entend ce bruit, celui de deux avions de chasse russes, je n’avais encore jamais entendu ce bruit. Ils volent très, très bas, ils fendent l'air et là, on sait que ça va être de nouveau un tapis de bombes”.
Ils devront par la suite prendre une décision rapide, en quelques minutes seulement, de traverser “à 120 km/heure”, le seul pont permettant de quitter Tchernihiv, alors qu’une bombe vient de tomber à quelques centaines de mètres. “On a eu de la chance”.
Pendant ce temps, à Paris et ailleurs dans le monde de nombreux services sont mobilisés, des correspondants diplomatiques, politiques, l’infographie, qui fait évoluer les cartes au fil des avancées russes, la documentation, les services d'édition des textes et des images dans toutes les langues, et bien sûr le service économique.
Des dizaines de sujets le concernent. “Que signifient les mesures annoncées pour “isoler” la Russie des systèmes de financement mondiaux? Que change la fermeture de l’espace aérien russe pour l’aviation mondiale ? Comment l’Europe peut-elle se passer du gaz russe ?
“L’équipe éco à Londres, qui centralise une bonne partie de la couverture des marchés du pétrole et des matières premières pour l’AFP, a passé le début du conflit presque à 100% en mode Ukraine”, explique Sophie Estienne, rédactrice en chef en charge de l’économie internationale. Un jour “on cherche des économistes, des historiens, des experts en géopolitique agricole”. Un autre “on décide de réaffecter des journalistes à temps plein pour une enquête sur les oligarques visés par les sanctions…”
Une “cellule Ukraine” globale, comprenant des journalistes parlant russe et ukrainien et travaillant sur plusieurs fuseaux horaires s’organise pour épauler les journalistes sur le terrain et rédiger des synthèses, dans le jargon AFP des “papiers généraux”, en s’appuyant également sur les “live” de l’AFPTV et le suivi des fact-checkers, qui traquent les images virales du conflit sur les réseaux, et démêlent le vrai du faux, vérifiant aussi les propos des uns et des autres, notamment de Vladimir Poutine.
Près d'un mois après le début de l’offensive russe, les destructions sont déjà immenses dans de nombreuses villes sur le front: Tchernihiv, Kharkiv, Kherson.. et Marioupol, privée d’eau, d’électricité et de gaz.
Kiev, comme d’autres villes, est transfigurée. “La vie s’est arrêtée”, se souvient Daniel Leal. Il n’y a plus d’école. Les gens ne vont plus travailler.
“Nous nous sommes habitués aux check-points, aux longues queues pour accéder aux (rares) supermarchés ouverts et aux pharmacies. Les Ukrainiens sont extrêmement solidaires entre eux. Cela aide à surmonter cette situation”, témoigne Dmytro Gorshkov, qui avoue qu’il est parfois dur de couvrir en tant que journaliste, la souffrance des siens. “Nous espérons tous que cela ne sera pas trop long”.
Rentrer, ou tout simplement quitter un lieu, même en restant en Ukraine, n’est jamais facile pour les journalistes.
“Une image qui me reste de Tchernihiv, poursuit Daphné Rousseau, c’est celle d’un grand-père qui marchait au milieu des ruines avec son seau.. Il avait l’air complètement désorienté. Il préparait sa cave pour y accueillir enfants et petits enfants, qui n'avaient pas réussi à s'organiser pour partir et qui pouvaient plus partir. Ils allaient s’enfermer dans cette cave jusqu'à ce qu'ils survivent ou que mort s'ensuive”.
“Il faut comprendre qu'il y a des civils qui ne peuvent pas partir soit parce qu'ils sont trop traumatisés, soit parce qu’ils n'arrivent pas à s'organiser. Quand on rentre le soir à l'hôtel, où on est quand même beaucoup plus en sécurité (...) on se dit qu'à cent kilomètres de là, on ne sait pas ce qui restera”.
Et rentrer chez soi, dans un pays en paix, après cette mission, est dur aussi. “Quand tu retrouves ta réalité, se réadapter prend du temps”, explique Daniel Leal. “Cela n’arrive pas quand on revient des JO de Tokyo, mais en couvrant une guerre, cela fait cet effet. Ces sentiments je les avais eus en quittant la Syrie aussi. On se sent déçu, profondément déçu, perdu, triste, on a l’impression de ne pas en avoir fait assez, d’avoir pu faire plus, mieux”.
Dave Clark, qui a coordonné pendant un mois le travail des équipes sur place, a senti quand il a quitté Kiev jeudi qu’il devait dire “à tout le monde”, qu’il serait “bientôt de retour”. “Mais en tant que coordinateur, j’ai aussi senti que je devais donner l’exemple”, et quitter l’Ukraine de bonne grâce. Car, comme le souligne Arman Soldin, journaliste de l’AFPTV basé à Londres reparti avec Dave Clark, les rotations entre équipes sont importantes.
“Dans la voiture qui nous menait vers la Pologne, je me suis rendu compte que nous étions tous fatigués physiquement, émotionnellement, et qu’il est dangereux de ne pas souffler et prendre du recul”, explique Arman Soldin, même si “bien sûr, j’ai quitté l’Ukraine à contre-coeur”. Ces rotations permettent aussi à ceux qui rentrent d’être assistés psychologiquement.
Aujourd’hui la journaliste ukrainienne Olga Shylenko, qui travaillait pour l’AFP à Kiev depuis 2014, est accueillie par des amis non loin de Bruxelles, d'où elle travaille à distance. Elle se sent “terriblement coupable”.
“Je viens de participer à une réunion avec d’autres femmes ukrainiennes, et nous avons toutes exprimé la même chose. Nous nous sentons coupables de cette vie confortable, où nous n’avons pas besoin de vivre dans des caves. Nous aimerions être là-bas, pour participer, mais nous sommes aussi des mamans”.
La nuit, elle fait des cauchemars. “Je rêve que je suis à Marioupol”, la ville portuaire qui vit un siège dramatique. Ses jumeaux de huit ans eux, sursautent quand l’aspirateur est allumé, demandant si c’est “une sirène”, ou quand ils entendent “le bruit des avions”.
Sur le terrain, en ce début de guerre aux fronts mouvants, le danger reste partout. Et le bilan des victimes s’annonce lourd, même s’il n’existe pas de véritable chiffre officiel.
La journaliste Cécile Feuillatre, le photographe Bulent Kilic et Luana Sarmini, JRI, en ont fait l'amer constat en début de semaine, en visitant la principale morgue, débordée, du port de Mykolaïv, dans le sud, où les habitants ont tenu tête à l'armée russe.
Samedi encore, ils ont rapporté la mort de dizaines de soldats dans une frappe visant une caserne militaire. L'homme sur la photographie qui suit a miraculeusement survécu.
Pour la seule ville de Marioupol, les autorités locales estiment qu'au moins 2.000 civils ont péri. Depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, au moins cinq journalistes ont été tués.
Etre sur le terrain au début d’un conflit c’est, pour civils et journalistes, “comme avancer à l’aveugle dans une pièce où ça tire de partout, sans savoir où on met les pieds”, raconte Daphné Rousseau.
“On ne sait pas quelles sont les forces en présence, combien sont-elles et où ? À quelle distance et surtout, quel est l'armement utilisé ? Est-ce que cela sera des Grad, ces ces missiles qu'on redoute le plus ? Parce que ces salves, ça tombe dans tous les sens. Est ce que cela sera un commando russe qui a réussi à avancer sur 100 mètres et qui sera dans un fourré et qui va juste tirer ?” “C'est une roulette russe”.
Ce billet a été réalisé grâce notamment aux témoignages des premières équipes de retour d'Ukraine pour être relevées par d'autres envoyés spéciaux. Merci à Dave Clark, Sophie Estienne, Dmytro Gorshkov, Antoine Lambroschini, Karim Menasria, Daphné Rousseau, Olga Shylenko, Arman Soldin, Daniel Leal, pour leurs paroles. Et à tous ceux qui ont été ou sont encore en première ligne pour couvrir ce conflit. Récits reccueillis par Michaëla Cancela-Kieffer.