Répression à moto au Venezuela
CARACAS, 17 mars 2014 - Depuis le mercredi 12 mars, la Garde nationale et la police du Venezuela ont durci la répression. Elles tentent d'éradiquer les violences qui éclatent lors des manifestations à Caracas, alors que le mouvement de protestation contre le président Nicolas Maduro durent depuis un mois. Beaucoup de manifestants sont désormais interpellés. Maduro les a appelé les « chukis », en référence aux horribles poupées d'une série télévisée. Le président a considérablement musclé son discours contre les « guarimbas », les manifestations de rue et les barricades.
Les arrestations se font de façon extrêmement rapide. On a presque du mal à se rendre compte qu'elles ont lieu. Les manifestants et les policiers s'affrontent, et au milieu des jets d'eau et des gaz lacrymogènes surgissent tout à coup une cinquantaine de motos lancées à pleine vitesse. Les deux policiers montés dessus traquent les protestataires qui s'enfuient à toutes jambes, mais ne sont généralement pas assez rapides pour échapper à leur capture.
Au bout de deux minutes, on voit les motos qui repartent avec trois personnes dessus: les deux policiers qui tiennent en sandwich leur proie, parfois menottée dans le dos.
La semaine dernière, alors que Nicolas Maduro procédait à une remise de logements subventionnés par l'Etat dans une banlieue populaire de Caracas, une trentaine de manifestants étaient arrêtés sur la place Altamira de la capitale en une vingtaine de minutes, après des jets de pierres et de cocktails molotov auxquels la police avait riposté à l'aide de gaz.
La fille sur la photo du haut n'a été que l'une des nombreuses personnes attrapées ce jour-là par les policiers à moto. Mais l'expression de son visage était particulièrement marquante, mélange d'effroi, de perplexité et de confusion. J'ai su immédiatement que cette image allait avoir un impact important. De fait, à peine était-elle diffusée par l'AFP qu'elle a commencé à être tweetée et retweetée des centaines de fois.
On ne sait pas très bien ce qui arrive aux manifestants une fois arrêtés. Selon la rumeur, la police se contente de relever leurs identités et leurs empreintes et de les prendre en photo, après quoi ils sont relâchés. Cela leur sert d'avertissement. S'ils se font prendre une deuxième fois, ils seront placés officiellement en état d'arrestation. Selon les chiffres officiels, il n'y a eu que cent arrestations depuis le début des protestations.
Le Venezuela traverse des moments difficiles, et une de ces difficultés concerne la communication. Pour beaucoup d'opposants, Twitter est le principal moyen de savoir ce qui est en train de se passer. C'est peut-être la raison pour laquelle ma photo a eu tant de succès.
Leo Ramirez est un photographe qui travaille pour l'AFP à Caracas.