Dans le ciel de la Route du rhum
SAINT-MALO (France), 4 novembre 2014 – Nous sommes trois photographes de l’AFP à couvrir le départ de la Route du rhum, une course transatlantique à la voile et en solitaire qui a lieu tous les quatre ans entre la Bretagne et la Guadeloupe. Le premier d’entre nous suit l’épreuve depuis un bateau. Le deuxième se poste sur le phare du cap Fréhel, à l'ouest de Saint-Malo, que doivent doubler les bateaux avant de foncer vers le grand large. Quant au troisième photographe, c’est le privilégié du groupe: il travaille depuis l’un des hélicoptères de l’organisation. Cette année, c’est moi qui ai eu cette chance.
Assister au départ de la Route du rhum depuis les airs est quelque chose d’impressionnant. On a un panorama d’ensemble sur les voiliers qui filent à toute allure sous le ciel menaçant, et sur la nuée de bateaux officiels et de plaisance qui les suivent. On peut voler d’un concurrent à l’autre rapidement et à notre guise. En plus, je peux travailler très confortablement, à l’abri du vent et de la pluie, contrairement à mes collègues Jean-Sébastien Evrard et Jean-François Monier, qui sont postés respectivement sur un bateau des organisateurs et sur le phare.
Sur la dizaine d’hélicoptères qui survolent la course, celui à bord duquel je me trouve ce dimanche 2 novembre est l’un des trois seuls autorisés à descendre en permanence jusqu’à une altitude de 150 pieds (environ 45 mètres, soit à peine 10 mètres du mat des trimarans de la classe Ultime) - les deux autres sont ceux des équipes de télévision qui filment en direct. Cela permet des prises de vue variées et intéressantes.
L’hélicoptère est piloté par un ancien de l’Aéronavale, Thierry Leygnac, un as qui a l’habitude de travailler au-dessus de la mer pour les preneurs d'images et sait exactement ce que nous attendons de lui. Je partage l’appareil avec un photographe et un caméraman de l’organisation de la Route du rhum. Nous décollons de l’aéroport de Dinard pour trois vols d’environ quatre heures au total. Nous suivons les concurrents jusqu’à plusieurs milles nautiques de la côte à une altitude qui va de 150 à 400 pieds (45 à 120 mètres environ) en fonction de nos besoins. Nous ne nous aventurons toutefois pas suffisamment au large pour perdre le rivage de vue.
Je travaille avec deux boîtiers. L’un est équipé d’un zoom de 28-300 mm, mon objectif «généraliste » pour les plans larges à moyens. L’autre dispose d’un téléobjectif de 200-400 mm. Il me sert à prendre des plans serrés des concurrents quand ils sont en mer. Il s’agit alors de bien construire l’image pour ne pas qu’elle ressemble à un portrait, mais qu’elle montre bien le skipper en action à la barre de son voilier.
A deux reprises, l’hélicoptère revient à Saint-Malo et se pose durant trois ou quatre minutes sur la piste de l’école de police de la ville. C’est pour les besoins du caméraman, qui doit régulièrement déposer les cartes-mémoire contenant ses images afin qu’elles soient diffusées au plus vite par son organisation. Je profite de chacune de ces très courtes escales pour transmettre une vingtaine de mes photos au moyen d’un routeur MiFi qui se connecte au réseau téléphonique 4G (ce qui est impossible depuis les airs). Mes images, ainsi que celles de mes deux collègues sur le bateau et sur le phare, arrivent ainsi rapidement au desk photo de l’AFP à Paris où elles sont éditées et diffusées aux clients dans la foulée.
C’est la deuxième fois que je couvre la Route du rhum. Il y a quatre ans, c’était encore plus spectaculaire mais aussi plus dangereux : les bateaux de plaisance s’approchaient beaucoup trop près des concurrents, sans réaliser qu’un trimaran lancé à pleine vitesse va vraiment très, très vite. Cette année, les curieux étaient plus disciplinés grâce à la présence en plus grand nombre de la gendarmerie maritime.
Bien sûr, une fois que les concurrents ont pris le large, le flux d’images de la Route du rhum se réduit considérablement. Les photographes de l’AFP ne couvrent plus que les éventuels retours au port de skippers favoris ayant abandonné la course. Nous passons le relais à notre confrère Nicolas Derne qui, à peine huit jours après le départ, photographiera l’arrivée du premier trimaran géant à Pointe-à-Pitre.
Damien Meyer est le responsable photo de l’AFP pour l’ouest de la France, basé à Rennes.