La dernière dépêche de Sardar Ahmad
KABOUL, 21 mars 2014 - Le journaliste de l'AFP à Kaboul Sardar Ahmad a été tué avec sa femme et deux de ses trois enfants, jeudi 20 mars, dans un attaque perpétrée par un commando taliban contre l'hôtel Serena de la capitale. Le troisième enfant du couple, un jeune garçon, était quant à lui dans un état critique.
Sardar Ahmad, 40 ans, était un pilier de l'AFP Kaboul où il travaillait depuis 2003. Il avait été au début embauché par l'AFP pour suivre les points de presse quotidiens de la coalition militaire menée par les Etats-Unis en Afghanistan, avant de devenir l'un des journalistes permanents du bureau. Il avait également fondé Pressistan, une agence de presse fournissant des services de traducteurs aux journalistes étrangers de passage en Afghanistan.
En marge du conflit armé, Sardar Ahmad, doté d'un humour contagieux, prenait plaisir à décrypter les tendances de la société afghane. Son dernier reportage retraçait la nouvelle vie de Marjan, un lionceau sauvé à l'article de la mort par le zoo de Kaboul après avoir passé des mois sur la terrasse d'un riche hommes d'affaires de la capitale. Le voici:
Nouvelle vie au zoo pour le lion qui vivait sur un toit
KABOUL, 19 mars 2014 (AFP) - Le zoo de Kaboul a dévoilé cette semaine sa nouvelle attraction: Marjan, le lion qui vivait sur le toit d'un palais de la capitale afghane avant d'être sauvé in extremis, à l'article de la mort.
Un riche entrepreneur afghan ayant fait fortune dans la construction avait acheté au printemps dernier, pour la coquette somme de 20.000 dollars, le lionceau qu'il avait installé sur la terrasse de sa vaste résidence en marbre au cœur de la capitale.
Entre l'achat de la viande, le salaire d'un gardien et les visites du vétérinaire, l'homme d'affaires devait dépenser plus de 1.000 dollars par mois pour prendre soin du lionceau en pleine croissance, un pari qui a manifestement mal tourné.
Les services de protection de la faune ont retrouvé l'animal en piteux état dès le mois d'octobre. « Il était dans un état critique. Il était presque mort, il ne pouvait plus bouger et ne pouvait même pas lever sa tête », a déclaré à l'AFP son vétérinaire traitant, Abdul Qadir Bahawi.
« Nous ne savions pas s'il allait survivre. Nos efforts ont porté leurs fruits et il est aujourd'hui en bonne santé, il aime jouer et je pense qu'il nous aime beaucoup », a-t-il ajouté.
Le jeune félin a été baptisé Marjan en l'honneur du célèbre lion à moitié aveugle du zoo de Kaboul, devenu un symbole de la résilience du pays pour avoir traversé l'invasion soviétique, la guerre civile et le régime des talibans avant de s'éteindre en 2002.
Le défunt Marjan, né en 1976, avait été blessé aux yeux par une grenade lancée par un soldat dont le frère avait été tué en s'aventurant dans la cage de l'animal.
Le jeune Marjan, aujourd'hui âgé d'un peu plus d'un an, avait défrayé la chronique à travers le monde l'an dernier lorsqu'un journaliste de l'AFP avait révélé sa présence sur le toit de la résidence de l'homme d'affaires.
La chute des talibans en 2001 a provoqué l'afflux de dizaines de milliards de dollars d'aide en Afghanistan. Certains Afghans en ont profité et mènent aujourd'hui une vie faste dans un pays toujours en guerre et qui compte parmi les plus pauvres de la planète.
Le propriétaire de Marjan dément toute cruauté envers le félin dont la santé a rapidement décliné malgré un apport quotidien en viande, se défend-il.
Après avoir récupéré Marjan chez son propriétaire, dans le quartier cossu de Taimani, les autorités ont entamé un programme de réhabilitation de cinq mois, avec massage et physiothérapie à la carte, afin de remettre le félin sur pattes.
« Aujourd'hui, Marjan mange huit kilos de viande par jour, à 16H00 précises », lance Qurban Ali, son gardien au zoo de Kaboul. Les Afghans pourront sous peu contempler le félin qui partagera son enclos avec une lionne donnée par la Chine.
Les responsables du zoo souhaitent accoupler les deux lions, un scénario qui semble toutefois peu probable. « Marjan est prêt, mais la lionne est âgée de 15 ans et a déjà subi deux sérieuses opérations. Je crains qu'elle soit trop vieille », regrette M. Bahawi.
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