Le lieu saint du skateboarding
LLANERA (Espagne), 7 janvier 2016 – J’ai appris l’existence de la Iglesia Skate par les réseaux sociaux. C’est une église désaffectée dans une ancienne zone industrielle du nord de l’Espagne. Un groupe de passionnés l’a transformée en temple du skateboard et un célèbre artiste l’a décorée à son goût. Un sujet photo sympathique pour la tranquille période entre Noël et le Nouvel-An.
L’église se trouve à Llanera, près d’Oviedo dans les Asturies. Elle faisait partie d’un complexe résidentiel pour les employés d’une fabrique d’explosifs abandonnée à la fin de la guerre civile espagnole en 1939. Il y a quelques années, elle a été rachetée par un groupe d’amis férus de skateboard, le collectif Church Brigade, qui l’a peu à peu aménagée pour en faire un lieu de pèlerinage pour tous les pratiquants de ce sport. Puis, fin 2014, l’artiste espagnol Okuda San Miguel, connu pour son utilisation très particulière de la géométrie et de la couleur dans ses peintures murales, est tombé amoureux de l’endroit et s’est occupé de refaire la décoration.
J’arrive sur place dans l’après-midi du lendemain de Noël. L’église vient d’ouvrir et les premiers fidèles sont là avec leurs planches. Comme je l’imaginais, c’est un lieu assez incroyable, curieux mélange d’architecture religieuse et de street art au milieu duquel des skaters foncent à toute vitesse sur des rampes de bois, chacun leur tour pour ne pas risquer de se télescoper sur cette piste sommes toutes assez étroite. Ils m’expliquent qu’outre son côté original, le principal intérêt de ce « skatepark » hors du commun est qu’il leur permet de pratiquer leur passion par n’importe quel temps, dans cette région où il pleut souvent.
Rien, dans l’Iglesia Skate, ne rappelle la fonction initiale du bâtiment, à l’exception d’un vieux confessionnal dans lequel plus aucun péché n’a dû être avoué depuis pas mal de temps. Les crucifix, les statues de la Vierge et les images pieuses ont disparu, remplacés par les fresques colorées d’Okuda San Miguel et sa « Kaos Star », figure récurrente dans l’œuvre de cet artiste qui représente une rose des vents asymétrique.
Une résurrection plutôt heureuse, pour cette petite église bâtie au début du XXème siècle et dont l’architecture n’avait en soi rien d’exceptionnel. Et pour moi, des images étonnantes, qui ont été aussitôt reprises par les médias du monde entier sans que j’aie eu besoin de réciter la moindre prière.
César Manso est un photographe indépendant basé à Burgos, dans le nord de l’Espagne, et qui collabore fréquemment avec l’AFP. Suivez-le sur Twitter (@CesarMansoFoto) Cet article a été écrit avec Roland de Courson à Paris.