Images insoutenables, mais nécessaires

PARIS, 6 févr. 2014 - Devant des dizaines de témoins, des militaires centrafricains lynchent un homme suspecté d'être un ancien rebelle de la Séléka, mercredi 5 février 2014, à l'issue d'une cérémonie officielle dans l'enceinte de l'Ecole nationale de la magistrature à Bangui. Un photographe de l’AFP et de nombreux autres journalistes assistent à cette exaction. Le photographe transmet au siège de l’agence à Paris 17 images de la scène, d’une violence insoutenable, et trois autres d’une tentative de lynchage d’un gendarme.

Comme le veut la règle, la légende des photos les plus sanglantes comporte la mention «graphic content» (« contenu choquant »), un avertissement destiné aux clients pour qu’ils prennent toutes les précautions nécessaires s'ils décident de publier.

AFP / Issouf Sanogo

« Ce sont des photos extrêmement dures, mais il était nécessaire les diffuser », explique Sylvain Estibal, le rédacteur en chef photo de l’AFP pour l’Europe et l’Afrique. « Elles en disent long sur l’état de la Centrafrique. Les auteurs de ce lynchage venaient de réintégrer une armée nationale reconstituée. Ils ont commis cet acte sitôt après avoir écouté un discours de la chef de l’Etat, c’est gravissime ».

Seules trois des images envoyées par le photographe, jugées trop atroces, ne seront finalement pas diffusées aux clients de l’agence. « La politique de l’AFP, c’est de ne pas montrer la violence pour la violence », poursuit Sylvain Estibal. « Avant toute chose, une photo doit apporter une information. Si on peut apporter la même information avec une photo moins violente, alors on choisit la photo moins violente. Par exemple, nous nous sommes demandés si nous devions ou non diffuser l’image en gros plan de la victime, encore vivante, en train de se prendre un coup de pied dans la tête. Au final, nous avons décidé de le faire. Cette photo montre qu'il s'agit d'un lynchage, que cet homme était bien vivant au début de la scène, et elle témoigne aussi de l'acharnement contre lui ».

AFP / Issouf Sanogo

AFP / Issouf Sanogo

AFP / Issouf Sanogo

AFP / Issouf Sanogo

AFP / Issouf Sanogo

Cliquez ici pour revenir au texte.