Après l'effort, sans réconfort
Désert d'Ica (Pérou) -- L’épreuve en valait la peine. A chacun la sienne d’ailleurs, celle des participants au Marathon des Sables et celle de la poignée de journalistes qui les ont suivi pour cette première édition au Pérou.
J’imagine que tout le monde ou presque a râlé, à un moment ou un autre, d'avoir à essuyer les plâtres de cette nouvelle aventure. Au final le souvenir des endroits extraordinaires que nous avons traversé l’emportera sans doute.
C’est le troisième Marathon des Sables que je couvrais. L’épreuve est mythique chez les fans de course à pied. Environ 250 kilomètres à couvrir, en une semaine et en autosuffisance complète. Seule l’eau est fournie au bivouac. C’est tout.
Depuis 1986 la course se tient traditionnellement dans le sud marocain. Je n’ai participé qu’aux deux dernières éditions. Dans ces conditions je ne m’attendais pas vraiment à être convié à cette première, dans le désert d’Ica. Ils m’ont prévenu cinq jours avant le départ de la course
J’ai pris mon avion pour Lima et à partir de là l’expérience a été plutôt « roots ». A peine arrivés nous avons embarqué pour huit ou dix heures de bus vers le sud péruvien et Cahuachi.
Au Maroc, c’est rodé. L’organisation et ceux qui accompagnent la course sont logés dans des tentes berbères. Les journalistes dorment à 2 ou 3. Il y a des prises électriques reliées au générateur. On est bien nourris.
Là chacun a reçu une petite tente. Du genre rudimentaire, un piquet avec une toile. Juste assez grande pour ne pas que mes pieds dépassent.
Réveil à quatre heures du matin, à chaque bivouac, pour ranger le tout dans le camion de l’organisation. En guise de petit-déjeuner, un café, -au mieux-, deux barres de céréales et une pomme, puis en voiture pour suivre la course.
Et là, nous passions sur une autre planète. Le désert d’Ica. Quelque chose d’assez unique. J’espère que les photos en rapportent bien le caractère. Il y avait bien quelques habitants sur la première étape. Mais ensuite, plus un chat.
Ça n’a pas été de tout repos. Au Maroc, les pisteurs de l’organisation repèrent le parcours prévu à la veille de chaque étape. Pour l’adapter le cas échéant, en cas de changement météo ou un autre impératif de sécurité. Ils nous briefaient chaque soir avant le départ du lendemain.
Au Pérou, nous avons suivi la trace des coureurs. Avec des chauffeurs venus tout droit de Lima et qui pour certains n’avaient visiblement jamais tâté d’un 4x4. Et pour conséquence l’indispensable participation des passagers pour se désensabler, pousser, creuser sous les roues.
C’est le seul bémol de l’histoire. Je crois que nous avons passé plus de temps à galérer pour avancer qu’à prendre des photos. Je dirai dans une proportion de 60/40, c’est dire.
Arrivés au bivouac, le défi, pour tout le monde, était de dresser sa petite tente ou son abri malgré un vent violent. Une galère.
Côté alimentation, les coureurs étaient autonomes. Certains essayaient de se bricoler un petit foyer pour réchauffer leur repas. Les plus prévoyants avaient récupéré quelques morceaux de bois sur le chemin . Une denrée rare dans le coin. Quant à nous, nous dépendions du camion de ravitaillement. Attendu une fois jusque tard dans la nuit.
Chez les compétiteurs, nous avons entendu certains se plaindre du nombre insuffisant de médecins pour soigner leurs bobos. Et on ne parle pas d'ampoules.
Evidemment, de ce point de vue le Maroc, c’est plus simple. Là nous étions au bout du monde. Au deuxième jour, mes collègues et moi-même avons failli laisser tomber. C’était trop dur. Et puis on a continué. Comme les coureurs, dont certains se plaignaient de manquer d’eau.
Mais bon, ils sont repartis avec des souvenirs inoubliables.
Après l’effort, c’était sans réconfort. Ca se voyait sur la tête de certains coureurs. C’était visiblement un gros truc physique à supporter. Ça se passera forcément mieux la prochaine fois, ici ou ailleurs. La 33è édition retourne au Maroc.