(AFP / Mohammed Al-Shaikh)

Révolutionnaires chiites aux regards perçants

MANAMA, 11 janvier 2013 – Bahreïn est la seule monarchie du Golfe où les chiites sont majoritaires. Mais le pouvoir, dans le petit Etat, est aux mains des sunnites. En 2011, un soulèvement de la majorité chiite a été durement réprimé par les autorités, qui accusaient les protestataires de collusion avec l’Iran. Mais les manifestations conduites par le parti d’opposition chiite, le Wefaq, n’ont pas cessé. Depuis quelques mois, elles prennent un tour de plus en plus violent.

(AFP / Mohammed Al-Shaikh)

«J’ai pris la photo ci-dessus dans le village de Sanabis, pendant une manifestation de solidarité avec les prisonniers politiques chiites», raconte Mohammed Al-Shaikh, photographe de l’AFP basé à Bahreïn. «A Bahreïn, le port du niqab, le voile intégral, n’est pas imposé. Il est fréquent de croiser dans la rue des femmes qui portent le hijab ou qui ne sont pas voilées du tout. Mais lors des manifestations, presque toutes les femmes portent le niqab. La raison est très simple : elles ne veulent pas être reconnues par la police. Un homme qui manifeste le visage masqué a tout de suite l’air suspect. Une femme, elle, peut toujours invoquer des raisons religieuses ! »

(AFP / Mohammed Al-Shaikh)

Conformément aux traditions locales, hommes et femmes défilent au même moment, mais chacun de leur côté. «A Bahreïn, il arrive aussi que des manifestations ne rassemblent que des femmes », poursuit Mohammed Al-Shaikh. «Elles veulent montrer qu’elles ne font pas que suivre le mouvement, qu’elles sont capables de diriger la révolution. De fait, elles rendent la police complètement folle : un policier mâle ne peut pas ceinturer une femme et la menotter, ce genre de contact physique serait contraire à la pudeur. Arrêter une manifestante est donc pratiquement impossible. Les forces de l’ordre se contentent de les disperser en répandant des gaz lacrymogènes. Les autorités tentent aussi de mettre sur pied un corps de policiers anti-émeutes uniquement composé de femmes».

(AFP / Mohammed Al-Shaikh)

L’opposition chiite réclame inlassablement la démission du Premier ministre, cheikh Khalifa ben Salmane Al-Khalifa. Considéré comme un tenant de la tendance dure, cet oncle du roi Hamad ben Issa Al-Khalifa est en poste depuis 1974. Des affrontements éclatent presque chaque soir dans les ruelles étroites des villages chiites aux portes de Manama.

Pour un photographe, c’est évidemment les manifestantes qui se prêtent aux clichés les plus impressionnants. «J’essaye de capter leur regard, de deviner ce qu’il exprime», explique Mohammed Al-Shaikh. «Je tente de capturer les deux ou trois secondes où, quand elles m’aperçoivent, leurs yeux se figent avant qu’elles ne détournent le regard».

(Propos recueillis par Roland de Courson).

(AFP / Mohammed Al-Shaikh)
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