Un manifestant pro-démocratie à Hong Kong, le 30 septembre 2014 (AFP / Xaume Olleros)

Les indignés de Hong Kong

HONG KONG, 30 septembre 2014 – Il y a quatre ans, j’ai couvert les manifestations du mouvement des « Indignés » au plus fort de la crise économique en Espagne. Le mouvement pro-démocratique de Hong Kong, qui exige les réformes politiques promises après la rétrocession à la Chine de l'ancienne colonie britannique en 1997, ressemble beaucoup à celui des « Indignados » : des gens qui tout à coup se réveillent, se demandent pourquoi ils ont dormi si longtemps et qui se précipitent dans la rue pour crier leur colère, en entraînant des tas d’autres gens dans leur sillage.

Sauf que personne n’avait jamais imaginé que ce genre de chose pourrait un jour se produire à Hong Kong…

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Il en résulte un certain désarroi de la police, peu habituée à réprimer des manifestations de masse dans cette mégalopole ultra-disciplinée. C’est peut-être ce qui explique la brutalité avec laquelle la police a dispersé les premières manifestations pourtant pacifiques (brutalité toutefois sans commune mesure avec celle dont j’ai été le témoin pendant les manifestations en Espagne). Cela se voit aussi à leur état de fatigue : les policiers ne doivent certainement plus compter les heures supplémentaires. Entre deux services, ils se reposent où ils peuvent, comme ici dans cet escalier qui mène à un bâtiment gouvernemental, transformé en dortoir pour agents exténués.

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Le côté un peu indécis de la police se voit aussi dans le cas de cette femme, qui dans un accès de colère s’est mise à foncer à mains nues sur les agents anti-émeutes casqués et armés de matraques et de boucliers dans la soirée du 28 septembre. Cela s’est passé dans un square à la lisière du quartier de Central, d’où les manifestants venaient d’être délogés par la police au gaz lacrymogène. La manifestante n’était pas une jeunette, elle devait avoir une trentaine ou une quarantaine d’années, elle était toute petite, les agents n’osaient pas lui taper dessus pour se défendre… Le square était faiblement éclairé, et la jupe rouge de l’assaillante en furie ressortait fortement au milieu de la scène. C’était parfait pour une photo. J’ignore ce qui est arrivé à la femme après son coup de sang.

Les manifestants pro-démocratiques restent non-violents. On sent qu’ils ont la rage, mais c’est une rage contenue. En Espagne, en France ou dans beaucoup d’autres pays, les choses dégénèrent facilement, les protestataires commencent vite à lancer des objets, à tout casser. Ce n’est pas le cas à Hong Kong. Lorsqu’ils se font disperser aux gaz au poivre, ils changent simplement d’endroit sans chercher la confrontation, avant de revenir plus tard.

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Le mouvement pro-démocratique de Hong Kong a été surnommé « la révolution des parapluies ». Le parapluie est un ustensile que tout le monde trimbale tout le temps ici, que ce soit pour se protéger de la pluie ou du soleil tropical. Naturellement, quand la police a commencé à asperger les manifestants de gaz au poivre, les gens ont ouvert leurs parapluies pour se protéger. Cet ustensile, surtout lorsqu’on l’ouvre à l’envers, est parfait pour faire barrage aux gaz et les renvoyer vers ceux qui les émettent.

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Depuis la célèbre photo de « la jeune fille à la fleur » de Marc Riboud en 1967, prise lors d’une marche contre la guerre du Vietnam à Washington, il est rare qu’une manifestation se produise sans que quelqu’un essaye de reproduire la scène. Cela n’a pas manqué à Hong Kong. Peu après l’incident de la fille en rouge, que j’ai décrit plus haut, les choses se sont un peu calmées et chacun a campé sur ses positions. Un jeune homme souriant s’est approché des agents anti-émeutes casqués et leur a tendu une rose jaune. Ce qui m’a permis de prendre cette photo, un grand classique.

Xaume Olleros est un photojournaliste indépendant qui collabore avec l’AFP à Hong Kong. Voir son site internet.

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